Forget you are ♪

Je venais juste de quitter Mauville, et sans grands regrets. En effet, je n'avais passé qu'un bref moment là-bas, mon petit tour de magie n'ayant pas très bien fonctionné, je m'étais retrouvé mêlé à un concours de circonstance qui m'avait mené d'une ruelle sympathique à un tribunal, en passant par la prison et ses pensionnaires taciturnes. J'en étais même venu à perdre l'autorisation de combattre avec mon fidèle Pride pendant un "certain temps" qui pouvait autant durer quelques jours que plusieurs mois...
Heureusement, je n'avais pas les mains vides et, grâce au don d'un dresseur, j'avais maintenant à mes côtés une adorable Skitty toute rose et souriante : Berry. Cette dernière ne semblait pas vraiment affectée par sa séparation avec son ancien propriétaire : il ne devait pas l'avoir capturée depuis longtemps. Elle me suivait de près comme un petit Ponchiot et semblait s'être plutôt attachée à moi.

Le fait de devoir me séparer de mon Furaiglon, même temporairement, me rappela que j'avais pour tout intérêt à attraper le plus de pokémons possible, surtout que depuis mon petit séjour au centre de détention, j'avais l'obligation de me battre dans des arènes, où siégeaient les champions qui, d'après les rumeurs, étaient plus puissants que d'autres dresseurs. J'en déduisait ainsi que le chaton, même accompagné de l'oiseau, ne me faisait pas une équipe assez consistante.
Depuis l'incident, je préférai éviter de voler les créatures des autres, aussi préférai-je aller en chercher des sauvages, au moins pour cette fois. Un chien ne revient jamais vers la main qui l'a frappée... Alors pourquoi pas un loup ? Après tout les gamins de dix/onze ans qui passaient leurs journées à chercher des insectes n'avaient pas l'air si malheureux...

Alors que je passait près d'elle, une touffe d'herbe remua. J'étais sûr qu'il s'agissait d'un pokémon. J'ordonnai à la féline de se placer devant lui. Malgré sa bouille d'ange, on devinait l'envie de combattre de la bestiole rose. Enfin... peut être prenait-elle ce combat comme un jeu...

Comme je n'avais vu qu'une petite touffe bouger, je pensais avoir affaire à un petit pokémon. Seulement, je vis apparaître rapidement des sabots, puis une grosse tête. Ce fut finalement un quadrupède d'une bonne soixantaine de centimètres qui apparut devant mes yeux et ceux du Skitty, qui semblait amusé de voir que le pelage de son adversaire avait la même couleur que le sien.
Pour l'instant, le faon ne paraissait pas belliqueux, et j'en profitai pour l'enregistrer dans mon pokédex, car oui, on me l'avait laissé.

C'était donc lui le fameux pokémon Saison, qui changeait d'apparence avec son environnement. Il était assez populaire, surtout au niveau de sa forme hivernale qui, à son évolution, était superbe. Il s'agissait donc d'un potentiel membre de mon équipe, étant donné que je prenais surtout sur coup de cœur. De plus, si je commençais par l'arène d'Ogoessse, j'avais un avantage si j'affrontais le type Eau. J'avais donc, une double raison de tenter de le capturer.

Encore ? Je tremblai quand on m'interpella puis me ravisai : on ne pouvait rien me reprocher d'illégal cette fois ! Un gamin était en train de geindre sous prétexte que c'était à lui que revenait le droit de capture du cervidé. Et sous quel prétexte ? Il allait voir un peu !

J'étais tellement sûr de moi que j'avais envie de combattre les yeux fermés pour le narguer. Cependant, ces derniers temps, les enfants étaient assez forts en combat, je devais attendre de le voir à l'action avant de le juger.

Je pensais qu'en voyant des humains combattre sous son nez, le Vivaldaim déguerpirait se cacher dans les hautes herbes. Heureusement, il resta pour nous observer, curieux au possible.
Le gamin contre qui j'allai combattre se présenta, il se nommait Farouk, il avait on-... Oui bon, on s'en fiche un peu en fait... Et pourtant, l'enfant semblait fier de lire sa carte de dresseur à la virgule près. Suite à quoi, il lança son unique pokéball et son compagnon en sortit. Je fus frappé de stupeur.

La "glace en cône" et son dresseur se semblèrent pas ravis de mon commentaire mais firent preuve d'une grande présence d'esprit en ne m'insultant pas à leur tour. Vraisemblablement, mon adversaire me laissait l'honneur de porter le premier coup, ouvrant ainsi la bataille.
J'avais un peu plus tôt fait exécuter à Berry les différentes attaques qu'elle connaissait. J'en avais dénoté environ huit, dont la moitié étaient offensives, les autres défensives. L'équilibre parfait ! Je pouvais donc varier tour sur tour.
La meilleure chose à faire était sans doute d'attaquer simultanément les deux créatures afin de ne pas fatiguer le Skitty avec des enchaînements. Cependant, il suffirait que je rate un coup pour que le faon rose ne s'en aille ou pour que le Sorbébé n'en profite pour prendre l'avantage. Et à vrai dire, je n'avais aucun intérêt à cela.

Un peu plus tôt, alors que je testais les capacités du chaton, je m'étais moi-même endormi en l'écoutant chantonner. Cette fois, je préférai ne pas me faire avoir et me bouchai les oreilles au moment où la féline s'apprêta à nous faire entendre sa belle voix.

La Skitty se mit à chanter. Heureusement, je n'entendais rien, je la voyais juste bouger les lèvres et je devinais que cette chanson devait être magnifique. Je fermai les yeux un instant, sûr et certain que le Sorbébé du gamin s'était à présent endormi. Seulement, en les rouvrant, je vis le pokémon blanc et son dresseur debout, bels et biens éveillés. Ce dernier me nargua justement :

Là dessus, il interpella son compagnon, non pas avec des mots, mais en faisant bouger ses mains. Je compris alors : j'étais en train d'affronter le seul monstre de poche sourd de toute la région d'Unys. Je pensais depuis ce moment là que j'étais un des plus malchanceux de cette pauvre terre. Il y aurait un clou entre Céladopole et Volucité, j'aurais marché dessus !
La glace en cône utilisa ensuite une attaque de son type après avoir vraisemblablement augmenté sa défense.
La première pensée qui me traversa lorsque j'appris la cécité de l'adversaire ne fut pas d'en tirer profit comme aurait pu le faire n'importe quel dresseur, mais plutôt : comment je vais faire mon compte pour m'en faire obéir ? Je n'étais pas très emballé à l'idée de retomber encore dans les rangs du vol. Cela avait beau m'amuser, ce n'en était pas moins maladif, et je préférais l'éviter. Seulement, la tentation était assez forte. Essayer de le voler ? Ne pas essayer ? Non, je n'allais pas essayer, j'allais le voler, tout simplement !
Maintenant, je devais réfléchir au reste. Comment le chaparder sans me faire arrêter dans ma course ? Je me souvins de mon combat contre le Judokrak quelques jours plus tôt. Une de mes plus grandes réussites pendant la bataille fut quand j'avais fait échouer la Patience du combattant en laissant Pride se percher sur les épaules du petit frère de l'ennemi, qui avait donc retenu son coup. Là, le but n'était pas d'éviter un assaut, mais d'en créer un. Même si je n'étais pas euphorique à l'idée de blesser quelqu'un, ça n'allait pas me traumatiser non plus. Je fis signe à Berry de s'approcher de moi et lui dit, non en chuchotant pour ne pas avoir l'air suspect, ni trop fort pour ne pas être entendu :

Au départ, je craignais la réaction du chaton rose. Il avait une tête d'ange. Et, si l'habit faisait le moine, il risquait de se retourner contre moi en apprenant qu'il devrait blesser un humain. Finalement, il accepta cela comme un combat comme un autre pokémon puisqu'il se plaça devant la crème glacée, prenant la position du chasseur, puis lui fonça violemment dessus, prêt à lancer son coup de boule.

Grâce à son élan, le chaton rose courrait maintenant à bride abattue vers la glace vivante. Il semblait ne pas pouvoir être arrêté. En effet, même s'il se tenait bien droit, prêt à recevoir un choc, le pokémon blanc se prit le coup de boule en pleine poire et fit un triple salto sur le côté, bien loin de la zone de combat. Le Skitty ne s'arrêta pas. Au contraire, il repartit de plus belle, vers le gamin cette fois. Ce dernier ne s'y attendant pas, il n'eut pas le temps de s'écarter. Le Psykoud'boule de Berry lui arriva en plein dans le ventre, comme prévu. Il tomba alors et se tordit de douleur comme une mouche à moitié morte.

C'était le moment où jamais ! Maintenant que le jeune dresseur connaissait ma psychologie et mes intention, il ne me laisserait sûrement pas partir sans avoir au préalable appelé des flics. J'étais déjà en froid avec eux, et je n'avais pas envie de repasser un séjour en prison, le précédent m'ayant amplement suffi.
Le Sorbébé étant maintenant plutôt abîmé, je devais en profiter pour l'embarquer avec moi. Le me précipitai vers le pauvre enfant qui gisait au sol pour prendre la pokéball de son compagnon. Après quoi, j'avais intérêt à déguerpir, et vite !

Alors que je voulais prendre la pokéball dans la main du garçonnet, celui-ci sembla retrouver ses esprit, et, petit à petit, il se relevait, difficilement mais sûrement. J'avais déjà envoyé Berry le frapper, je trouvais que lui mettre un punch en pleine face n'était pas la plus fair-play des actions. Bon, tant pis, je laissai tomber !

Je commençai à détaler. Le ville n'était pas loin et j'étais tout de même plus rapide qu'un gamin défoncé par une attaque d'un pokémon, puissante qui plus est. Néanmoins, je courrai le plus vite possible, de peur qu'il ne trouve le moyen d'appeler des policiers, avec son portable par exemple, s'il en avait un.
Finalement, j'étais arrivé en quelques secondes devant le centre pokémon, mais en sueur, à moitié étouffé par ma course pas poursuite. En entrant, je me fis aborder par la sympathique infirmière, qui me demandait, comme un robot si je souhaitais faire soigner mes pokémons. N'ayant pas vraiment la tête à ça, je lui répondit négativement.
En voyant le téléporteur pour le Terminal Mondial, que j'avais déjà emprunté une fois pour récupérer mon Skitty, il me vint l'idée de squatter cet endroit quelques temps, histoire de ne pas me faire harceler par le dénommé Farouk. En y repensant, je me sentis pris de remord à cause de la blessure que la féline lui avait infligé sous mes ordres. Je repensais également à l'arrêt cardiaque que j'avais failli faire quelques secondes plus tôt de peur de me faire attraper.
Visiblement, le métier de vrai voleur était bien différent de celui de simple pickpocket. Tout portait à croire que ce n'était pas fait pour moi, je devrais peut être prendre ma retraite anticipée.
Je regardai par la suite mon chaton. Ce dernier me regarda avec la même bouille d'ange qu'il avait depuis que je l'avais obtenu. Il était l'innocence incarnée... J'avais presque pitié de lui, qui cheminait avec un cambrioleur de bas étage. Je me décidai donc à contrecœur qu'il serait mieux pour Berry, et pour Pride que je devais récupérer dans quelques jours, de me quitter...